Pour les fascistes, le problème des «mariages
mixtes» (entre Juif et «aryen») et de leur descendance,
a été - dès les premières lois raciales et jusqu'à la fin de
la guerre - particulièrement épineux car il leur imposait
de distinguer nettement le non-Juif du Juif afin d'en
déduire qui méritait ou non de vivre. Au delà de l'intérêt
historique qu'il présente, cet aspect peu connu des
idéologies racistes met bien en évidence le caractère
délirant de celles-ci.
Cela ressort en premier lieu des textes législatifs de
divers états européens, ici analysés en détail, mais aussi
des innombrables conférences, débats, échanges de
lettres au sein des administrations qui se sont évertuées
à résoudre cette insoluble question. La correspondance
diplomatique révèle aussi le manque de fermeté des
positions du Vatican par rapport aux projets de lois
raciales, en Italie et en France, et l'heureuse surprise que
cela constitua pour les fascistes.
Outre la folie des lois, c'est aussi l'arbitraire de leur
application - en Italie, en Allemagne et dans les pays
occupés - qui est traitée avec une sobre rigueur. Des
exemples bien choisis montrent l'extrême diversité du
sort réservé aux victimes, grâce à des documents souvent
inédits, toujours émouvants. Les lettres des prisonniers
à leurs proches mettent en lumière leur dignité
dans l'épreuve, tandis que la correspondance officielle
dévoile l'acharnement méthodique des administrations,
le zèle dans le crime des subalternes, la veulerie de
beaucoup et le courage de quelques-uns.
C'est dans la mémoire du sort tragique de leur propre
mère, morte en déportation, que les auteurs ont puisé la
force de cette vaste enquête menée de l'Italie à la
France et à l'Allemagne, jusqu'aux rivages de la Baltique.